Le CE et le CHSCT doivent être consultés en cas de modification importante des conditions de travail. Mais comment mesurer le caractère « important » des projets ? Présentation des éléments normatifs et de la jurisprudence.
Principes généraux
Le CHSCT est informé et consulté « avant toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, et notamment avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l’outillage, d’un changement de produit ou de l’organisation du travail avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail » (Code du Travail. art. L 4612-8-1)
Le CE est informé et consulté en cas de problème ponctuel intéressant les conditions de travail résultant de l’organisation du travail, de la technologie, des conditions d’emploi, de l’organisation du temps de travail, des qualifications et des modes de rémunération (C. Trav art. L 2323-46) …
… ainsi que les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail ou les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle.
Cependant, la consultation du CE ne s’impose qu’en cas de mesure revêtant « une certaine importance » (jurisprudence de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation)
Ainsi, l’employeur doit consulter le CE et le CHSCT pour tout projet ou décision concernant un nombre significatif de salariés et ayant, sur le plan qualitatif, une incidence déterminante et durable sur les conditions de travail (CA Paris 2015).
Caractériser « l’importance »
L’importance du projet ne doit pas être évaluée en fonction du seul nombre de salariés concernés (Cass. Soc. 2010)
Peut-être considérée comme importante, une mesure ne concernant pourtant qu’une faible partie du personnel, en raison
- Soit de la gravité des conséquences qu’elle entraîne pour une catégorie de salariés
- Soit de sa vocation à être étendue à un grand nombre de salariés (CA Versailles 2013)
Exemples de consultations obligatoires CE
Déménagement de la totalité des activités d’une société et de son siège social dans des locaux appartenant à la maison mère (CA Paris 2004)
Exemples de consultations obligatoires CHSCT
- Le projet de regroupement sur un même site d’un service commun réparti sur plusieurs sites intéressant 80 salariés, dont la mise en œuvre doit entrainer le transfert hors de leur secteur géographique d’origine ou le changement des attributions de ces salariés (Cass. Soc. 2010)
- Le changement d’horaires affectant 255 travailleurs postés sur un effectif de plus de 400 salariés (Cass. Soc. 2000)
- Le projet d’instaurer un test de dépistage de stupéfiants susceptibles de déboucher sur des sanctions disciplinaires (Cass. Soc. 2012)
Exemples de consultations non obligatoires CHSCT
- Le projet déplacements des bureaux d’un étage à un autre au sein d’un même bâtiment standardisé avec des équipements collectifs identiques (CA Bordeaux 2010)
- L’arrêt de l’activité d’un établissement pendant 10 jours pour des opérations de maintenance périodiques affectant 32 salariés sur 249, une partie des salariés participant à ces opérations (Cass. Soc. 2014)
Quelles instances compétentes, dans quel ordre et quels délais ?
Lorsque l’entreprise n’est composée que d’un seul établissement, le CE et le CHSCT sont consultés. S’il existe plusieurs CHSCT, chaque CHSCT concerné par le projet est consulté, à moins qu’il n’existe un CHSCT central ou une Instance Temporaire de Coordination. Dans les entreprises à établissements multiples, il en est de même. Sont également consultés les CE ou le CCE selon les compétences de chaque instance.
Si le CE et le CHSCT sont consultés, le CHSCT rend son avis en premier. Le CE rend ensuite son avis après avoir pris connaissance de celui du CHSCT.
Le code du Travail stipule : L’avis du ou des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et, le cas échéant, de l’instance de coordination est transmis au comité d’entreprise au plus tard sept jours avant l’expiration du délai (Art. L2323-1-1)
Une nouveauté de la loi Rebsamen constitue un grand changement dans les délais (Loi du 17 août 2015 relative au dialogue social) : le décret du 29 juin 2016 fait courir le délai à compter de la communication par l’employeur des informations prévues par le Code du Travail.
Ainsi, le délai ne démarre plus à la réunion d’information mais bien lors de la communication des informations ou de leur mise à disposition dans la BDES ; Soit au minimum 8 jours avant.
Les élus du CHSCT doivent mettre à profit les délais – réduit à 8 jours – pour étudier le projet et préparer l’éventuel recours à l’expert, qui dans ce cas doit être associé le plus en amont possible.
Le recours à un expert externe
Le CE peut faire appel à un expert rémunéré par ses soins. Le CHSCT peut recourir à un expert agréé rémunéré par l’employeur.
Le recours à un expert agréé s’appuie sur 3 éléments fondamentaux :
- Le droit pour les IRP de disposer d’une information autonome distincte de l’employeur et d’exprimer un point de vue différent avec des propositions d’amélioration du projet
- La réduction de l’asymétrie des moyens et de connaissance par rapport à l’employeur
- Un outil au service de la chaine globale de prévention des risques.
Le cabinet Impact Etudes accompagne les élus du personnel selon une méthodologie explicite et agréée :
- Sur leurs besoins en formation, sur les projets concernant les conditions de travail et la santé au travail
- Dans l’accompagnement au dialogue social
- Pour mener à bien des expertises CHSCT, en cas de risque grave ou pour aider à comprendre les enjeux et impacts des projets présentés par l’employeur
Ce sujet d’actualité a été le thème de notre conférence lors des Assises du CHSCT (Eluceo Stade de France) le 28 septembre dernier et a rencontré un fort succès auprès des représentants du personnel : plus de 80 auditeurs sont venus écouter et questionner Stéphane ROOSE, Directeur d’Impact Etudes, expliquant les nouvelles modalités et jurisprudences concernant les aménagements importants et les consultations des instances représentatives du personnel.
Contact Stéphane ROOSE, 06 21 82 61 84
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